Martin
Dammann
Im Wasser 3, 2019
Im Wasser 3, 2019

Martin Dammann
Im Wasser 3, 2019
Aquarelle et crayon sur papier ( (207 x 164 x 9 cm) + (207 x 147 x 9 cm) + (207 x 149 x 9 cm) Overall : 207 x 470 cm encadré )
Pièce unique
© Thomas Lannes

Martin Dammann
Im Wasser 3, 2019
Detail

Martin Dammann
Im Wasser 3, 2019
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Martin Dammann
Im Wasser 3, 2019
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Martin Dammann
Im Wasser 3, 2019
Vue d'ensemble

1/5

Extrait du texte "Abstieg" d'Amélie Lavin, directrice du musée des beaux-arts de Dole (2018)   


   Cet ensemble de grandes peintures présentées de façon presque immersive nous entraîne avec l'artiste dans cette plongée : nous sommes sous l'eau, sous des corps immergés dont le torse et la tête disparaissent comme aspirés vers le haut de la feuille. L'image est étrange comme une image de rêve, troublante parce qu'on la comprend tout en hésitant à la (à se) situer correctement dans l'espace. Troublante aussi car, comme les images de rêve, elle résiste et il nous est difficile de dire si ces figures aquatiques et le mouvement de l'eau nous entraînent vers le fond ou nous poussent au contraire à en sortir la tête.


    Pour la première fois, avec ces grandes aquarelles, Martin Dammann ne peint pas à partir d'une photographie mais à partir d'une image mentale. Peut-être pour faire face à quelque chose de moins historique et de plus archaïque. L'archéologie ou la psychanalyse pourraient être des clefs d'entrée pour des oeuvres qui semblent désormais plus de l'ordre de la vision que de l'image.


Martin Dammann réinvente ici d'une certaine manière le caractère épiphanique des premières images sacrées, dont le mode d'être s'apparentait à une incarnation mystique : l'apparition, dans le champ du visible, de ce qui est invisible. Rien de sacré dans les oeuvres présentées ici par Martin Dammann mais quelque chose de l'ordre d'une apparition, qui creuse le phénomène magique qu'est celui du surgissement d'une image. Rien d'étonnant d'ailleurs à ce que la photographie, dont l'histoire est aussi intimement liée à cette question de l'apparition et de l'invisible rendu visible, soit si présente dans le travail de l'artiste depuis trente ans.




Martin Dammann peint des énigmes. Nous ne saurons pas ce que cherchent ces figures, nous n'arriverons pas à percer le mystère de ces oeuvres, séduisantes par leurs incroyables coloris et pourtant peu rassurantes. Jusqu'à ces grands formats sur contreplaqué presque vides, où ne restent que des traces, les marques d'un phénomène qui nous échappe ou qu'il nous est peut-être donné, à nous-même, d'écrire.

« de l'eau qui l'avait recouvert, il glissait à ce monde calfeutré des profondeurs de la terre. Une évidence plus forte que les certitudes des vivants allait du sang qui tout à l'heure ruisselait dans la carlingue à ce tunnel étouffant ; tout ce qui avait été la vie se diluait comme des souvenirs misérables dans une torpeur profonde et morne ; les points lumineux menaient dans cette obscurité chaude leur vie de poissons des grandes dépressions »

Malraux, l'Espoir